Joséphine : une bonne étoile pour Napoléon ?

Nulle femme assurément n’a autant compté dans la vie de Napoléon que l’impératrice Joséphine. Disparue au crépuscule de l’Empire, le 29 mai 1814, elle était considérée par les grognards comme la «bonne étoile » de l’Empereur. Liant son destin à celui du prometteur « général Vendémiaire », la veuve créole d’Alexandre Beauharnais, égérie légère des salons du Directoire, dont le comportement alors n’est pas exempt de reproches, allait se révéler, au grand dam de la famille Bonaparte, une impératrice digne et respectée. Mieux: n’hésitant pas à faire le sacrifice de cette exceptionnelle union dans l’intérêt de la dynastie, elle resta fidèle à l’homme jusqu’au bout, malgré les ultimes revers et sa propre douleur.
Raphaël Dargent. Historien.

La renommée de Joséphine semble tellement liée à celle de Napoléon qu’on en viendrait presque à occulter le fait que l’Impératrice des Français a eu une vie avant sa rencontre avec le jeune Bonaparte. Et pourtant !

L’enfant des Îles
Née à la Martinique le 23 juin 1762 aux Trois-Îlets, sur la plantation de ses parents –un domaine de 527 hectares qui ne compte pas moins de trois cent vingt-sept esclaves – Marie-Josèphe Rose Tascher de la Pagerie est d’ascendance noble. Du côté paternel, les Tascher de la Pagerie ont participé aux croisades et, du côté maternel, les Vergers de Sannois ont des ancêtres apparentés à Louis VI le Gros. C’est le grand-père de Marie-Josèphe qui opte en 1726 pour l’aventure « américaine » et s’installe à Fort-Royal. Outre Marie-Josèphe, ses parents Joseph Gaspard et Rose Claire auront deux autres filles, Désirée et Marie-Françoise, nées respectivement un an et deux ans et demi après leur aînée.

«Bons planteurs », soucieux de son éducation, le couple dote l’enfant d’une nourrice, une mûlatresse libre (laquelle surnomme Marie-Josèphe « Yéyette ») puis la place avec sa cadette chez les Dames de la Providence à Fort-Royal. Elle y reçoit une éducation sommaire, mais l’avenir d’une jeune fille ne réside-t-il pas, en ce temps et en ce milieu, dans la qualité du mariage que ses parents peuvent contracter pour elle ? M. de Beauharnais, ancien gouverneur général des Isles, souhaite justement marier son fils Alexandre à une de ses filles. Joseph Gaspard, confronté à de mauvaises récoltes et à des difficultés financières – les Tascher sont de longue date de piètres gestionnaires –, n’hésite pas. Marie-Josèphe deviendra vicomtesse de Beauharnais! La future belle-famille réside à Paris ? Va pour Paris ! Marie- Josèphe fera le voyage et quittera son île pour la capitale !

Les enfants ont peu à dire en la matière, mais le sort qu’on leur réserve semble très bien leur convenir. Alexandre se satisfait de la Créole que son père présente comme étant très attrayante, ayant « une fort belle peau, de beaux yeux, de beaux bras et une disposition surprenante pour la musique». Quant à Marie-Josèphe, bien qu’elle ne puisse –c’est bien compréhensible à seize ans ! – cacher la peine que constitue pour elle l’éloignement de sa terre natale et de sa famille, elle éprouve une certaine fierté à découvrir Paris. Une prédiction est restée fameuse, quoique jamais vérifiée, qui veut que ce soit dans ces moments-là qu’une devineresse lui ait annoncé qu’elle serait « plus que reine ». En attendant, en cet été 1779, elle embarque direction Brest en compagnie de son père et s’apprête à épouser le vicomte de Beauharnais. C’est un début. […]

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