La rocambolesque évasion de Lavalette (20 décembre 1815)

«Je veux vous marier Lavalette ! Je vous ai trouvé une femme», dit Napoléon Bonaparte à son aide de camp.  Avant même d’être empereur, ou Premier Consul, il était un grand marieur. Il s’était d’abord occupé de sa famille, ses frères, ses sœurs, sa belle-fille. Cette fois ci, il s’agissait de la nièce de son épouse, Émilie de Beauharnais. «Si vous êtes tué je lui ferai une pension ou je lui trouverai un autre mari.» Entrer dans la famille de son général est une proposition qui ne se refuse pas. La jeune fille de dix-sept ans, recueillie par sa tante après la séparation de ses parents, était la compagne de sa cousine Hortense, dans la pension de madame Campan. Ce fut là qu’il la rencontra, le 29 avril 1798 (19 floréal an VI).

par Marie-Hélène Parinaud, docteur en histoire

La jeune fille grande et mince était amoureuse de Louis Bonaparte, frère du général, mais difficile de dire non à celui qui était devenu un père de substitution et lui avait annoncé qu’elle allait épouser Antoine-Marie Chamans de Lavalette. Elle se résigna lorsqu’elle vit apparaître au lieu d’un prince charmant un petit homme poupin, aux yeux et au nez minuscule, ayant déjà un fort embonpoint : «Mademoiselle, je vous quitte dans quinze jours pour l’Égypte, ouvrez-moi votre coeur. Si cette union n’est pas de votre goût, dites-le moi.» Pour toute réponse, la timide jeune fille tendit le petit bouquet de fleurs qu’elle portait à son «fiancé». Sage, discrète elle sera une épouse effacée autant que présente auprès de son époux devenu comte de Lavalette et directeur des postes. Un emploi clef, car un des pivots du pouvoir. En effet, le courrier était monopole d’État depuis 1801, mais surtout le directeur des postes centralisait à la fois le service des transports et le courrier, pouvant, sur ordre, censurer ou diffuser les nouvelles.

En 1814, la chute de l’Empire avait exilé Napoléon à l’île d’Elbe. Pendant que l’Empereur rongeait son frein dans l’inaction, Antoine de Lavalette faisait de même à Paris. Il avait été remplacé au poste qu’il occupait depuis douze ans par le comte Ferrand, tout dévoué à Louis XVIII. Un jour que, comme à son habitude, il trompait son ennui en se promenant dans les rues de la capitale, il fut doublé par un ami, Paul Lagarde, qui lui glissa à l’oreille en le dépassant : «Ne faites aucun geste, ne montrez aucune surprise, ne vous arrêtez pas. L’Empereur a débarqué à Cannes.»

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